JUSTICE POUR KAMEL BELKADI !

 

(Ce texte est l’analyse faite par le Bureau de l’Union Locale CGT de LONGWY concernant les attendus de jugement rendus par le tribunal correctionnel de Briey le 12/10/2004. Il est paru dans les colonnes du « CHIFFON ROUGE » de décembre 2004 - Journal de l’Union Locale CGT du Bassin de LONGWY-  tiré à 8 500 exemplaires)

 

 

 

JUGEMENT DE L’INCENDIE DE DAEWOO  ou

 

COMMENT ON A ECARTE LES ELEMENTS QUI INNOCENTENT KAMEL ... !

 

 

 

Premier constat, première question : Pourquoi les      attendus du jugement n’ont-ils été transmis à l’avocat de Kamel que près d’un mois après sa condamnation, et non dans la foulée, comme de coutume ? Faut-il y voir l’indice d’un jugement « tout ficelé » qu’on essaie de légitimer après coup ? … Toujours est-il qu’à la     lecture des attendus on s’aperçoit que les éléments qui innocentent Kamel ont été « oubliés » ou écartés de manière bien peu convaincante.

 

Quant aux questions que devraient soulever une étude attentive de l’enquête, non seulement on n’y répond pas, mais on ne se les pose même pas !

 

Ainsi le tribunal se contente de relever que le système de sécurité a été détérioré entre le 18 et le 23 janvier 2003, sans poser les questions qui en découlent :

 

-Qui a mis la vanne n° 5 en position fermée ?

-Qui a dégradé le boîtier général de contrôle ?

-Qui a percuté les extincteurs ?

-Qui a désarmé la plupart des boîtiers d’alarme ?

 

Ainsi on relève que c’est « la direction qui a donné pour consigne de réduire le nombre d’agents de sécurité à 2 par poste », mais on ne discute pas le prétexte est sensé justifier cette démarche :  c’est simplement « pour diminuer les coûts ». On accepte également sans discuter qu’ »il a été demandé aux vigiles de ne plus effectuer de rondes extérieures ni intérieures » sous prétexte que l’un d’entre-eux a été pris à partie le veille par plusieurs salariés.

L’inconséquence, l’irresponsabilité de réduire le système de surveillance dans un   climat social aussi lourd de tensions, on ne la questionne pas … serait-ce de peur de découvrir des éléments qui puissent faire supposer qu’il y a plus  que de l’irresponsabilité dans la conduite de la direction ?

 

Décidément, ces patrons, qui ont pratiqué des malversations financières, des détournements de fonds, et qui ne payaient pas leurs cotisations à l’URSSAF, décidément ils sont insoupçonnables !

 

On ne relève pas les contradictions entre les expertises de Messieurs Menard (« absence de résidu de substances inflammables ») et Lenormain (« la mise à feu s’est développées en présence de matières inflammables au point de départ »).

 

Il faut savoir que le magistrat instructeur a refusé un complément d’expertise du fait que le témoignage d’un pompier infirmait l’hypothèse émise par Lenormain qu’une armoire électrique aurait été aspergée d’un liquide inflammable. Pourquoi croire le pompier plutôt que l’expert ?

Le doute subsiste (d’autant qu’on reconnaît que le « processus technique qui a abouti à la destruction de l’armoire électrique n’est pas formellement établi »), et dans ce cas, il semble évident qu’il y avait lieu de pratiquer une 3e expertise pour tenter d’y voir plus clair.

 

On affirme que « personne n’avait intérêt à ce que l’entrepôt et son contenu disparaissent dans les flammes », en s’appuyant sur l’évidence que les stock d’une valeur de 1,2 millions d’ « représentait pour les salariés une garantie dans le cadre des négociations sociales »  mais en reprenant aussi la notion que « ce stock constituait pour la direction une rentrée potentielle d’argent frais »..

...A première vue, c’est imparable … mais on oublie de se poser question sur le fait que l’incendie a eu pour conséquence une  liquidation judiciaire immédiate, ce qui a permis à la direction de DAEWOO-ORION de faire l’économie d’un plan social.

 

Question, encore, qu’on oublie : combien ce plan social, même minimal, aurait-il coûté à DAEWOO ? A l’évidence, beaucoup plus que les 1,2 millions d’de stock puisque l’avocat de DAEWOO, lors d’une  audience devant le tribunal de commerce le 9 janvier 2003 évaluait les indemnités de licenciement, de congés payés et de préavis à 3 millions d’€.

 

On considère que « l’hypothèse de l’intrusion d’une personne extérieure (qui aurait mis le feu) n’apparaissait pas plausible en raison de la configuration des lieux, notamment la présence d’u grillage tout autour du site » … Tous ceux qui étaient présents pendant l’occupation de l’usine savent bien que, compte tenu des nombreuses allées et venues par le portail d’entrée, c’était un jeu d’enfant de pénétrer et de ressortir du site par ce portail sans se faire repérer !

 

On invalide systématiquement les témoignages en faveur de Kamel : « Seuls              3 témoins affirment que M. Belkadi est resté au poste de garde et ne s’est absenté à aucun moment ». (on aurait pu dire, mais on ne l’a pas dit : seul 1 témoin accuse M. Belkadi …).  Bref, les déclarations du premier « ne sont manifestement pas crédibles », au prétexte qu’il a refusé de répondre à certaines questions des enquêteurs et du juge d’instruction.

Ce qu’on oublie de dire, c’est que ce témoin a dénoncé devant le tribunal les pressions dont il a été l’objet tout au long de l’enquête pour lui faire dire que kamel était coupable ….d’autre part, il a fait 3 semaines de détention, alors qu’aucune accusation était portée contre lui !

 

Pour le second témoin à décharge, on « oublie » de dire qu’il a toujours attesté, sans jamais varier dans ses déclarations, que Kamel était présent et n’avait pas bougé du poste de garde de 20 H jusqu’à ce que l’alerte soit donnée. C’est  quand même fort de café ! … d’autant plus que ce témoin a précisé qu’il était assis face à l’horloge du poste de garde et pouvait donc certifier les horaires. On omet de signaler la teneur exacte de son témoignage, mais on tient quand même à invalider son témoignage : «  tout laisse à penser qu’il commet une erreur à propos des horaires qu’il indique ». Pourquoi ?parce qu’il affirme que Kamel est arrivé au poste de garde aux environs de 20 H, alors que d’autres témoins déclarent que celui-ci n’était pas présent à 20 H 10. Là encore, on oublie que 2 autres témoins confirment la présence de Kamel aux environs de 20 H. Pourquoi croire les uns plutôt que les autres ? Quoi qu’il en soit, ces discordances d’horaires n’ont rien à voir avec les circonstances de la mise à feu, puisque l’expert Ménard estime que celle-ci « a pu se produire à 20 H 35 »

 

Quant au 3e témoin en faveur de Kamel, « ses déclarations doivent également être écartées » :on lui oppose un autre témoin, qui estime qu’à 20 H Kamel n’était pas encore arrivé au poste de garde … mais on oublie que cet autre témoin atteste que Kamel était présent à 20 H 15 !

 

Les témoins à charge bénéficient d’un tout autre traitement. Deux d’entre eux ont affirmé que Kamel n’était pas au poste de garde à 20 H 15. Lors de l’audience, ils ont été pour le moins confus quant aux précisions horaires … qu’à cela ne tienne ; « les approximations relatives aux heures lors de leur déposition orale sont à mettre en relation avec le temps qui s’est écoulé depuis les faits » ! Et là encore, on « oublie » que l’un de ces témoins a déclaré à l’audience : « Il (Kamel) était peut-être revenu et que je ne l’ai pas vu » !

 

 

Quant au « témoin-clé », le seul qui accuse Kamel d’avoir mis le feu, les preuves de la véracité de sa version ce sont … « le niveau intellectuel du témoin (chacun à l’audience a pu constater qu’il s’exprimait très confusément, avec un langage frustre, et ne comprenait manifestement pas certaines questions), sa spontanéité parfois déconcertante, et le fait qu’il n’a strictement aucun intérêt à faire des déclarations mensongères ». Qu’est-ce qui prouve qu’il n’a pas fait l’objet de pressions en ce sens ? Et puis surtout, on « oublie » encore « un détail » : l’accusateur de Kamel a prétendu que celui-ci était passé avec le fenwick par une porte rouge … dont tout le monde convient qu’elle était bloquée depuis plusieurs semaines et ne permettait pas le passage d’un tel engin !! Tous ceux qui étaient à l’audience ont entendu l’accusateur affirmer que Kamel était passé par cette porte rouge, les magistrats ne l’ont pas relevé dans leurs attendus …

 

Enfin comble du comble, le jugement fait   silence sur les contradictions horaires du   dossier d’accusation, que l’avocat de Kamel, Maître BEHR, a relevé dans sa plaidoirie, démontrant sans équivoque l’impossibilité matérielle que Kamel ait pu mettre le feu dans le créneau horaire défini par l’enquête.

Quant à nous, nous relevons que 6 témoins s’accordent sur la présence  de Kamel au poste de garde à 20 H 15 peut-être même jusque 20 H 20 . L’accusateur, lui prétend qu’il en est parti entre 20 H et 20 H 15. Selon cet accusateur, lui-même, Kamel et un 3e salarié (qui lui, n’a jamais accusé Kamel), seraient partis à pied au packing (un service de l’usine), puis auraient commencé à jouer aux cartes. Kamel serait alors reparti, toujours à pieds, au poste de garde pour y réchauffer sa gamelle, serait revenu avec un fenwick, aurait manœuvré celui-ci, puis aurait pris son repas? Ils seraient alors repartis tous les 3 vers le poste de garde ; Kamel lui aurait demandé un briquet, se serait éloigné quelques instants, et ils seraient revenus au poste de garde pour 20 H 30.

 

Si l’on prend en compte les 6 témoins qui attestent de la présence de Kamel au poste de garde à 20 H 15, toutes ces actions, ces allées et venues, se seraient déroulées en 15 minutes au plus. Si Kamel était passé avec le fenwick par la « porte rouge », ce créneau horaire était déjà « limite » … mais la « porte rouge » ne permettait pas le passage d’un fenwick ! Et la longueur du détour que cela implique rend strictement impossible un retour au poste de garde pour 20 H 30, heure à laquelle l’accusateur lui-même déclare que Kamel était de retour.

 

On notera de plus que la thèse de l’accusation est formulée dans les mêmes termes dans les attendus : il est apparu que M. Belkadi (…) n’était pas, selon plusieurs témoins, présent au poste de garde entre 20 H et 20 H 30 ». Mais alors, puisque l’expert Méard estime que « la mise à feu a pu se produire vers 20 H 35 » (ce que les attendus « oublient » de prendre en compte au moment de conclure …) ...  QUI A DONC MIS LE FEU ?

 

 

Le Bureau de l’U.L. CGT LONGWY